Zapping sur Russie

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La " troisième Rome ", capitale de l'Orthodoxie après Byzance, redécouvre son identité…
Moscou veut changer de visage et entrer dans la " modernité à l'occidentale ". Elle s'enorgueillit de ses beaux quartiers en rénovation, de ses galeries marchandes et de tout son luxe par trop ostentatoire. Mais Moscou cache sa honte, c'est le Moscou des exclus, ce qui dorment dans les bouches de Métro et qui tendent la main aux porches des basiliques…
Saint-Pertersbourg, ville des stars, se prend à rêver des fastes d'antan. Stalingrad était une parenthèse…comme une adolescence.
La magie est omniprésente dans cette cité où l'art se vit au quotidien. Mais aujourd'hui la Venise du Nord qui à inspiré tant de poètes, d'écrivains, de musiciens, cherche, à l'image de toute la nation à laquelle elle appartient, sa nouvelle voie…


Le renouveau religieux : les rédemptés

C'était le feu sous la cendre. Le vent du renouveau a soufflé et la flamme s'est ravivée. Aujourd'hui, c'est flammes, c'est braises incandescentes, c'est passions dévorantes. Les églises reviennent en " honneur de sainteté ". On les restaure, on les reconstruit, les icônes sont retirées des musées, dépoussiérées et replacées en lieux saints, les dorures sont redorées. Le citoyen russe, dans sa quête d'un monde meilleur, s'adresse au divin et reprend le chemin des basiliques. L'opium du peuple fait plus que jamais des émules…Et dire qu'on tarde à légaliser la marijuana !



Défilé devant le mausolée de Lénine : Les nostalgiques

Peut-être eux aussi ont-ils espéré une nouvelle société où liberté et justice ne seraient pas incompatibles ou peut être n'ont-ils vu dans les bouleversements de cette fin de siècle que le signe du chaos…mais les uns comme les autres se retrouvent aujourd'hui, amères ou nostalgiques pour commémorer " LE SYMBOLE " : il y a 77 ans, mourait le père de la révolution Russe. La place rouge était blanche, le cortège était noir, les bannières étaient rouges. Le portrait du maître était hissé, un enfant précédait le défilé, un bouquet d'œillets rouges à la main.



Le métro : les anonymes

Le tunnel est éclairé, mais je n'en voit pas le bout. L'escalator remonte sa triste cargaison de passagers vers la lumière du jour. Le souterrain dégueule sa populace sans discontinuer. Des visages, et encore des visages, encagoulés de fichus, de chapka et toques de tous poils, des faces aux traits douloureux, des angéliques, des moustachus…des qui ont l'air méchant, l'air fatigué, l'air distrait par quelques pensées fugaces, ou absorbé par la lecture de leur journal du matin. Je parle du métro de Moscou. Son design baroque fait partie du quotidien des moscovites, seuls quelques touristes s'attardent sur ses mosaïques et ses fresques retraçant l'épopée des héros nationaux, ses sculptures, purs produits de l'art bolchevique où chaque pièce est un hymne à la révolution, ses marbres, ses luminaires " belle époque "…voilà là un cocktail bien insolite auquel seul, un regard étranger doit trouver quelques piment.



Tout est à vendre : Les nouveaux pauvres

Une rue en chantier…engins, barrières, planches, balises de fortune, trottoirs éventrés, canalisations à ciel ouvert, matériaux entreposés de part et d'autre, piétons circulant tant bien que mal dans une neige boueuse…décor planté. C'est ici, aux abords de la station du métro de Vassileostroskaïa (St-Petersbourg), le rendez-vous (un parmi d'autres) de ceux pour qui vendre, tout, n'importe quoi, à tout prix, est le seul moyen de subsistance. On y trouve marchandises et objets en tous genres posés à même le sol ou sur du matériau destiné au chantier le transformant ainsi en étal providentiel : trois têtes d'ail, une paire de chaussures usagée mais encore en très bon état, un potiron, des livres, des chaussettes faites à la main de grosse laine écrue, des ustensiles de cuisine. Ce n'est pourtant pas le vide-grenier, certaines marchandises ont été achetées pour être revendues. Et toute cette foule, acheteurs comptant leurs quelques roubles , vendeurs nécessiteux, discute, négocie avec acharnement, échange des heures entières, indifférente au froid de l'hiver et la courbe du chômage laisse présager un brillant avenir à cette fourmillante activité.



La rue comme salut : Les vieux

Un passage sous-terrain, une sortie de métro, un porche d'église et ils sont là, enveloppés dans leurs linges, dans une superposition de laines, de parkas plus ou moins fourrés, de fichus et parfois le sacs plastiques si l'humidité devient trop pénétrante. Un peu plus de mille roubles, ça fait un peu moins de trois cent francs de pension de retraite par mois… c'est pas beaucoup 300.00 F pour se loger, se nourrir, se soigner, s'habiller. C'est pas beaucoup et ça fait mal après une vie d'universitaire, de soldat ou d'ouvrier, passée à servir la mère patrie. Alors, si la solidarité familiale ne peut s'exercer, on va chercher le complément dans la rue. La rue c'est dur, mais ça permet de s'en sortir. Le passant est généreux. Il est pieux et compatissant. Il pense que ce n'est pas digne d'une grande nation que d'abandonner ses vieux.



Liberté chérie : Les nouveaux riches

" Nous sommes enfin un pays libre. Il y a 10 ans, quand le communisme s'est effondré, papa est devenu actionnaire d'une société jusqu'alors administrée par l'état. Nous n'étions pas riches mais papa avait des relations, et nous avons pu profiter de l'occasion. C'était une bonne affaire. Il a revendu une partie de ses actions à un investisseur allemand et j'ai pu monter ma propre boutique de matériel informatique, très bien située dans la galerie Goum, prés du Kremlin. Depuis le nouveau régime, nous trouvons tous les biens de consommations qui étaient autrefois réservés aux occidentaux. Les marques les plus prestigieuses sont désormais représentées dans nos villes : mode, parfums…".
C'est vrai, quel plaisir des yeux que ces femmes en manteaux de fourrures qui déambulent dans les grands magasins. C'est la Russie éternelle (vison, caviar, vodka…) que le rouleau compresseur du communisme avait tenté de niveler!
Mais qu'on se le dise, le Russe nouveau est arrivé, qui veut mordre à pleines dents la société consumériste et libérale…des gagneurs, des battants qui n'ont cure de misérabilisme, de larmoiements stériles ou de mauvaise conscience. Ah, Russie éternelle, tu as encore de beaux jours devant toi !



La Banlieu

Au bout de St-Petersbourg, il y a la mer Baltique…Terminus métro, banlieue grise, immeubles décrépis, gens mal fagotés, zone industrieuse, grues, tours, engins, terrains vagues enneigés, neige cache misère, chiens errants mais au bout du quai…la magie !
L'immensité blanche et gelée de la mer Baltique. Sortant des brumes matinales, des constructions lointaines paraissent comme des fantômes. Au delà de la plage qui se confond avec la mer, les pêcheurs se sont installés, assis sur leur pliant, ou debout, ils ont découpé un trou dans la glace, y ont plongé leur ligne et ils attendent. Loisir dominical, ou petite activité de subsistance au même titre que le potager ou la cueillette des champignons, ce mode de pêche est très ancré dans la tradition des russes du nord, et ce, malgré les accidents qui surviennent parfois quand la glace se brise.



Le marché kolkhozien : les authentiques

Y a le quartier des bouchers. Des pièces de viande découpées s'étalent sur des bancs de bois, bien propres et bien rangées par catégories : les côtelettes, les filets, les gigots…les têtes sont suspendues et semblent regarder les passants de leurs orbites vidées. Un chien passe, on lui lance, à la volée une longueur de tripe qu'il s'empresse d'engloutir. Plus loin, ce sont les maraîchers et les étals multicolores. Les fruits et légumes viennent du Caucase ou des rives de la mer Noire. Des marchands Ouzbek ou Kazakhs accostent le client. Des alignements de balances, modèle unique, forment une symétrie de chaque côté des allées. Autour des étalages de poissons, c'est le rendez-vous des chats. Ils y prospèrent, ils sont gras. Les crémières, toutes de blanc vêtues, pèsent, découpent, emballent fromages et produits laitiers, les vendeuses de miel, s'acharnent à vous en faire découvrir les saveurs, les herboristes, les pâtissiers…et la foule se presse autour des rayons, avide de remplir paniers et cabas.

Michèle Soullier


VENTE DE DIGIGRAPHIES



Date : Janvier 2001
Lieu : Russie, St Petersbourg et Moscou
Materiel :
Boitier Canon T90
Objectifs FD 24,35,50 et 135mm
Films Ilford Hp5+